15 Sep, 2021 | Neurosciences | 1 commentaire

Jouets incontournables 0 – 3 ans (ou la théorie des affordances en pratique)

Neurosciences | 1 commentaire

Chloé

Écrit par Chloé THYRION

  1. Le meilleur jouet est celui que l’enfant choisit

J’ai évoqué dans un autre article la multiplication incroyable du nombre de connexions entre la naissance et 5 ans, donc au moment même où l’enfant est passionné par l’exploration de son environnement.

A ce moment, le cerveau a besoin d’une multiplication importante de connexions pour se structurer et l’enfant va naturellement être attiré par des expériences qui lui permettent d’alimenter son cerveau en développement.

Ainsi, dans les premières années de la vie, le bébé va spontanément vers ce qui stimule son cerveau de manière optimale.

Il faut savoir aussi que quand le bébé s’intéresse aux objets, il ne s’intéresse pas à ce à quoi servent ces objets mais à ce que lui peut faire avec.  C’est la théorie des affordances.

Les affordances sont les caractéristiques de l’objet qui induisent au corps de l’enfant la manière dont il doit l’utiliser.

Laurence Rameau donne l’exemple d’une chaise : quand un bébé perçoit une chaise, au départ il ne voit pas un objet pour s’asseoir, il voit un objet avec 4 pieds qu’il va pouvoir soulever, pousser, éventuellement retourner, ou sur lequel il peut grimper. Il va l’explorer et il va découvrir ses propriétés physiques : c’est un objet dense, assez lourd,  qui peut se déplacer,  se retourner, etc…

On voit alors la différence de perception entre l’adulte et l’enfant. Pour l’adulte, les objets ont des fonctions et doivent être utilisés d’une certaine manière : celle pour laquelle ils ont été conçus. Pour l’enfant, les objets ont des propriétés à découvrir et c’est seulement en les manipulant qu’il va pouvoir le faire.

Revenons au cerveau en développement…

Le bébé va être attiré par des objets, des jouets qui correspondent à ses centres d’intérêt et à ses objectifs du moment.

Un peu avant ses 2 ans, j’avais présenté à mon fils une activité avec des disques troués à emboîter sur des axes. Il a regardé de manière attentive et puis quand je lui ai passé l’activité il a pris les disques, un par un, et il s’est amusé à les faire rouler dans la maison. Au moment où je lui ai présenté, mon fils n’en avait rien à faire de l’utilisation réelle de cet objet par contre ces disques ont induit à son corps l’idée de les prendre et de les faire rouler : il les a utilisés selon leurs affordances.

Je lui ai ensuite proposé une planche positionnée de manière à créer un plan incliné. Je lui ai montré comment on pouvait placer un jouet en haut puis le laisser rouler le long de la planche.

Cette simple planche a été source d’une grande activité d’expérimentation : pendant les semaines qui ont suivis il a passé plusieurs heures par jour à expérimenter pour voir ce qui allait rouler, pas rouler, ce qui allait glisser ou pas etc…

Ainsi, dès les premières années de la vie, le jeune enfant est capable de se concentrer longuement sur une activité à condition qu’elle corresponde à ses objectifs et à ses centres d’intérêt du moment.

Et de manière intéressante, ces activités qui suscitent une grande concentration sont celles qui stimulent le cerveau de l’enfant de manière optimale.

2. Les jeux moteurs sont incontournables

Deuxième catégorie de jeux dans mon top 3 : tout ce qui concerne la grande motricité, c’est-à-dire la motricité qui implique l’ensemble du corps : les tapis, les structures, les modules de motricité, les tunnels, les barres de suspensions etc…

Les activités motrices sont essentielles chez le jeune enfant, elles lui permettent de développer son autonomie, son aisance corporelle, la prudence, la confiance en soi et l’esprit d’initiative.

La motricité c’est la première marche du grand escalier du développement de l’enfant : c’est la base pour développer la motricité fine, la représentation de l’espace, la régulation des émotions, le langage et même les habiletés sociales.

Il y a beaucoup plus d’interactions positives entre les jeunes enfants lors des jeux moteurs en comparaison avec tous les autres types de jeux : comme les enfants sont très mobiles, ils sont particulièrement visibles pour les autres et cela va favoriser l’imitation et la prise en compte de l’autre.

Ainsi, au-delà de tous les bienfaits pour le développement global de l’enfant, les activités motrices  vont aussi permettre d’apprendre en douceur les bases de la vie en société.

3. Un jouet plus classique : les boîtes gigognes

Les boîtes gigognes sont un formidable jouet qui permet à l’enfant d’appréhender les relations spatiales et les différences de grandeur.

boîtes gigognes

La psychomotricienne Gladys Debieux décrit très bien les bénéfices de ce jeu : les boites gigognes permettent à l’enfant de comprendre concrètement la double propriété, c’est-à-dire qu’un objet peut être à la fois « plus petit que »  et « plus grand que », il peut être aussi « inclus dans » et en même temps « inclure ».

L’enfant expérimente et il comprend qu’il doit mettre les boîtes dans un certain ordre pour qu’elles s’emboîtent toutes les unes dans les autres. Il construit alors des bases solides, concrètes pour appréhender la logique ordinale des nombres (le fait que les nombres suivent un ordre, chaque nombre est précédé d’un nombre plus petit et suivi d’un nombre plus grand).

Il s’aperçoit aussi que la boîte la plus grande renferme toutes les autres : cela lui permet d’appréhender la logique cardinale du nombre  (plus un nombre est grand plus la quantité est importante)

Il ne le conceptualise pas comme un adulte mais il le vit à travers son corps et cela lui donne des bases solides pour ses apprentissages futurs. 

Gros bémol sur les boites gigogne du commerce : elles sont souvent de différentes couleurs. Cela amène généralement le bébé à utiliser une autre stratégie : celles de retenir l’ordre des couleurs ce qui est vraiment dommage car on perd alors la découverte de toutes ces propriétés…

Je vous invite donc à proposer des boites gigognes le plus simple possible et d’une seule couleur qui permettront à l’enfant d’appréhender ces propriétés et d’avoir des bases solides pour ses apprentissages futurs en mathématiques.

Chez vous ou dans vos structures, quelles sont les activités et les jeux les plus prisés ❓

1 Commentaire

  1. Mathilde

    Bonjour Chloé,

    Merci beaucoup pour cet article. Je ne connaissais pas la théorie des affordances. Je vais aller lire un peu plus à ce propos.
    Je suis une ÉJE reconvertie et maintenant je fabrique des jouets. Avec mes lectures et mes expériences j’essaie de créer du matériel qui répond à l’intérêt de l’enfant. Je vous remercie d’avoir expliquer la différence entre des boites gigognes monochromes et celles colorées.
    Mathilde

    Réponse

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